L'instinct sacrificiel : le bouc-émissaire et le souffre-douleur


Après avoir présenté les trois types de caractères sociaux et certaines de leurs expressions, je souhaite consacrer un article à une forme d’expression en particulier, qui me semble intéressante tant par les questions qu’elle soulève sur les besoins d’un groupe social que celles qu’elle soulève sur notre rapport à la violence.
Les phénomènes du bouc-émissaire et celui du souffre-douleur sont assez liés mais n’ont pas exactement la même fonction au sein d’un groupe.
Le premier apparaît sporadiquement dans les interactions sociales. Il se caractérise par un traitement particulier appliqué injustement sur une ou plusieurs personnes. La notion d’injustice est ici importante, car c’est bien la particularité d’un bouc-émissaire : il pâtit pour les autres, et s’il est peut-être parfois lui-même partiellement coupable de quelque chose, il subira dans tous les cas les conséquences de la culpabilité de tout le monde et pas seulement de la sienne.
En effet, la désignation d’un bouc-émissaire, qu’il fisse tout à fait partie du groupe ou seulement de façon superficielle, répond à un besoin de résoudre une tension interne au groupe. Cette tension peut provenir de plusieurs choses mais elle s’ancre systématiquement dans un sentiment de souffrance que le groupe ne parvient pas à résoudre. Il peut s’agir par exemple de défaites militaires à répétition, de problèmes de famine, de mauvaises récoltes, d’épidémies, de catastrophes naturelles, etc. En somme, cela prend la forme d’évènements tragiques, peu importe leur nature, dont la cause n’est pas clairement entendue, soit parce qu’elle est difficile à interpréter, voire impossible, soit parce que son entendement risque de révéler des vérités sur le groupe qui sont trop difficiles à accepter pour celui-ci.
Dans la balance transactionnelle de chaque individu qui compose le groupe, il peut ainsi être acceptable d’envisager le sacrifice d’un être innocent si cela permet de s’en sortir à bon compte. Sacrifier une personne majoritairement reconnue comme assez différente du groupe, notamment une personne au tempérament autonome, et généralement assez peu désirée par celui-ci offre plusieurs avantages. Tout d’abord, le groupe peut choisir plus ou moins consciemment de s’illusionner quant à l’utilité du sacrifice : il cherche à conjurer le mauvais sort. Ensuite, il peut s’agir d’une occasion de se débarrasser d’une ou plusieurs personnes que le groupe tolère plus qu’il n’approuve. La présence et les actions de ces personnes apparaissent préalablement pour le groupe comme pénibles mais non dignes de réprimandes : la balance transactionnelle n’est pas assez avantageuse pour passer à l’action. Cependant, par les circonstances de souffrances qui ne sont plus supportables, l’équilibre de la balance se modifie et elle peut basculer jusqu’à présenter un véritable avantage dans le passage à l’acte. Ici, il peut y avoir deux phénomènes, souvent entremêlés :
le premier est réellement un sacrifice dans le sens où la ou les victimes subissent un sort indépendant de leur propre responsabilité
le second est un véritable règlement de comptes, parfois justifié, et qui prend place au moment même où le groupe a décidé de recourir à la violence
Le second phénomène est assez connu mais ne devrait pas être confondu avec le premier (certaines personnes le font volontairement pour masquer leurs véritables responsabilités dans des évènements, en jouant la carte de la victime), car il ne s’agit pas du même processus psychique. Pour le comprendre, il faut se rendre compte que la décision de recourir à la violence et la réalisation même de cette violence sont toujours vécues comme des évènements importants pour un groupe, d’autant plus si celui-ci recherche par ailleurs une certaine paix sociale. Briser un statu quo où les interactions sont pacifiques pour mettre dans la balance de tout le groupe le recours à la violence n’est pas anodin, et soulève toujours à la fois des peurs et des excitations. Ainsi, lorsque le groupe passe en « mode de violence », il peut en profiter, là aussi, souvent plus ou moins consciemment, pour régler tous ses comptes à la fois. Parce qu’accepter d’entrer en violence est coûteux psychologiquement, la plupart d’entre nous ont tendance à se dire que ça vaut le coup d’en profiter pour en user partout où ça nous semble nécessaire. Le même phénomène existe lors de différends au sein des couples où le conflit amène ce dernier à mettre sur la table un maximum de ses souffrances, car on se dit plus ou moins que « c’est le moment où jamais » ou bien que « foutu pour foutu, autant y aller carrément », que, quitte à avoir souffert de la douleur d’avoir crevé l’abcès, autant en profiter pour le vider complètement de son pus. Cela se produit parce que les risques que nous prenons en brisant le statu quo deviennent tout à coup réels. Il ne s’agit plus de la projection de notre peur de ce qui pourrait se passer si nous brisions le statu quo mais bel et bien de la peur de ce qui pourrait se passer maintenant qu’il est brisé !
La même chose se déroule dans les groupes sociaux (humains ou animaux d’ailleurs) et il est presque systématique que les exactions ne soient pas tout à fait justes. Dans la volonté du groupe de résoudre ses conflits internes par la violence, il y a toujours des dommages collatéraux et des victimes innocentes, dans le sens où elles-mêmes n’ont pas souhaité causer de mal au groupe.
C’est cependant là tout le cœur du sujet. En réalité, le groupe ne cherche pas particulièrement à rendre une justice en correspondance de la malveillance de certains éléments mais en correspondance de ce qu’ils font subir au groupe, même si cela se fait malgré eux.
Une personne handicapée de naissance par exemple, n’est pas responsable de son état et elle peut tout à fait par ailleurs exprimer pour le groupe une authentique bienveillance. Cependant, la question n’est pas là. Si sa simple existence dérange le groupe, pour une raison ou une autre et, dans l’exemple présent, le groupe peut potentiellement la reconnaître comme responsable d’un affaiblissement de par son caractère d’impotence liée à son handicap, alors le groupe peut nourrir le désir, plus ou moins conscient, de se débarrasser d’elle à un moment ou à un autre. Dans un contexte de rupture du statu quo (on parle aussi de rupture de la normalité), il se peut tout à fait que cette personne handicapée soit une victime.
Cela semble terrible mais c’est une loi de la nature. Il arrive que les animaux se comportent de la même façon et l’on peut facilement y voir une sélection naturelle.
Cependant, le groupe n’a pas nécessairement raison quant à son jugement. Il peut par exemple s’en prendre à une personne qui ne l’affaiblit pas ou même le renforce. Tout dépend de la façon dont il va considérer, inconsciemment ou consciemment, la personne en question et on a vu souvent au cours de l’Histoire des mouvements de foules sacrifier des personnes qui essayaient de les aider ou qui pouvaient leur apporter beaucoup.
Il se peut aussi que le groupe se trompe quant à sa balance transactionnelle, non pas parce que son jugement est erroné mais parce qu’il est incomplet. Pour reprendre l’exemple d’une personne handicapée, il est correct de dire qu’elle peut physiquement affaiblir un groupe, mais un groupe ne se détermine pas uniquement à ses capacités physiques et cette même personne peut potentiellement apporter de nombreuses choses par ailleurs. Aussi, dans un contexte d’abondance, où l’urgence de la survie se fait plus distante et où il est possible, comme à notre époque, de mettre en place des solutions pour que de nombreuses personnes handicapées puissent vivre décemment sans affaiblir le groupe, de tels comportements sacrificiels perdent leur sens. Cependant, c’est là faire preuve de raison et il ne faut pas oublier que nous ne fonctionnons pas nécessairement de façon rationnelle et que nous ne sommes pas égaux sur ce point. Ainsi, nos réflexes inconscients fonctionnent avec une inertie et ne s’estompent que si les conditions y sont propices de façon assez longue dans le temps, cela ne se fait pas du jour au lendemain, ou bien chez une toute petite partie de l’humanité dont les capacités de réactualisation sont particulièrement rapides (généralement des profils autonomes).
Par ailleurs, il arrive aussi souvent que ce soit le chef d’un groupe qui serve de bouc-émissaire à ce dernier, souvent de façon très cruelle, à la hauteur en fait, de la déception générée par celui-là. C’est notamment pour cette raison que les potentats de toutes les époques ou presque tendent à vouloir s’extraire de ce type de destin en régnant de façon indirecte. À notre époque, ce mécanisme est particulièrement marqué et les chefs les plus puissants sont inaccessibles et, pour certains, littéralement inconnus.
Le phénomène du souffre-douleur est différent de celui du bouc-émissaire et si les deux procèdent du même besoin de base du groupe, il est rare que le premier finisse comme le second.
Le souffre-douleur est presque toujours du groupe des suiveurs (plus rarement une personne autonome). En effet, les chefs et les autonomes sont en moyenne plus puissants que les suiveurs, individuellement, et ils impressionnent les groupes. Or, ceux-ci choisissent toujours comme souffre-douleur celui ou celle qui ne présente pas de grand danger, une personne que l’on peut martyriser sans trop de conséquences.
Le souffre-douleur a, pour le groupe, plusieurs rôles :
il représente une limite anthropologique au groupe, qui le considère comme inférieur à ce qui est attendu pour en faire partie, sans pour autant l’exclure
il soude le groupe, qui affermit ses liens par une responsabilité commune dans le recours à la violence, le groupe devient ainsi complice de celle-ci et sa fidélité interne augmente
il sert de défouloir aux frustrations du groupe, qui lui sont généralement complètement étrangères, et en atténue ainsi les conflits internes, qui pourraient le faire imploser, ce qui est presque toujours considéré par les animaux sociaux comme un grave danger de mort
À partir de ces trois points, on comprend pourquoi le souffre-douleur doit souffrir et non mourir. En effet, il ne s’agit pas pour le groupe de se débarrasser de lui, à l’instar d’un bouc-émissaire (dont le sacrifice fait sens pour le groupe, d’une manière ou d’une autre), il s’agit de lui attribuer un rôle au sein du groupe et pas n’importe lequel : celui de dérivatif à la souffrance.
Car il s’agit bel et bien d’une fonction sociale et c’est parce que celle-ci est particulièrement ingrate que le groupe ne souhaite pas sacrifier son souffre-douleur. En effet, tous les membres du groupe savent, plus ou moins consciemment, que la disparition de celui-ci ne peut conduire qu’à deux issues possibles : soit le groupe implose, soit quelqu’un d’autre prendra la place du souffre-douleur. Et c’est souvent à cette dernière idée que le groupe, de façon apparemment paradoxale, va choisir de prendre suffisamment soin de son souffre-douleur pour ne pas le perdre. Un équilibre délicat dont la véritable teneur et le véritable sens sont presque toujours ignorés.
Cette dualité entre le fait de se défouler sur une personne et d’en prendre soin amène généralement les souffre-douleurs à développer un sentiment ambivalent quant au groupe auquel ils appartiennent. Il s’agit d’un mélange d’amour et de haine. La haine provient censément des souffrances que lui inflige le groupe de façon non méritée et l’amour provient de son attachement au groupe, naturel pour un suiveur et même indispensable à sa survie.
Ce type de relation est très souvent incompris par des observateurs extérieurs et des personnes peu au fait de ce qui se joue réellement entre les protagonistes. Beaucoup de personnes ne vont pas comprendre, par exemple, qu’un souffre-douleur puisse prendre la défense de ses bourreaux et même éprouver pour eux de la gratitude. C’est pourtant ce qui se passe souvent et c’est bien normal, quand on comprend que, dans sa balance transactionnelle personnelle, le souffre-douleur préfère souffrir de la violence de son propre groupe plutôt que d’être abandonné par ce dernier et s’exposer à un destin plus funeste encore.
Dans les faits, c’est souvent le meneur d’un groupe qui désigne en premier celui ou celle qui endossera le rôle de souffre-douleur. Il s’agit pour lui d’affermir son autorité en signalant ce qui arrive à ceux qui ne répondent pas à ses conditions transactionnelles de protection et de guidance. Cela marque une limite d’acceptation collective. En répons de cela, certains suiveurs sauront martyriser derechef le souffre-douleur pour montrer à leur meneur qu’ils ont bien compris le message. C’est une démonstration d’allégeance.
Car un chef qui accepte tout le monde sans distinction inquiète fortement son groupe et s’expose à une éviction et des représailles. En effet, tout groupe humain cohérent nécessite des individus en dedans du groupe et en dehors du groupe, une délimitation claire d’appartenance et de non-appartenance. Si cette délimitation devient floue, le groupe s’inquiète car alors il ne sait plus s’il est réellement en sécurité ou si, au contraire, son chef est en train de l’exposer à des dangers et serait donc en train de trahir la confiance qu’il lui a préalablement accordé.
À savoir également que la plupart du temps, le souffre-douleur est martyrisé par des personnes de son genre. Un souffre-douleur de sexe masculin sera principalement humilié par des hommes et un souffre-douleur de sexe féminin par des femmes.
En plus des raisons déjà citées, ce comportement genré propre au traitement des souffre-douleur possède des raisons d’ordre sexuel.
Dans le cas des hommes, cela provient du fait qu’une femme, même perçue comme de peu de valeur, sera considérée comme une potentielle partenaire sexuelle, tandis qu’un homme de peu de valeur sera perçu comme un boulet, un frein à l’ambition, avec qui il ne faut pas se lier d’amitié.
Les hommes dominants tendent à ne jamais complètement rejeter la possibilité d’une relation avec la totalité des femmes. Il s’agit, en l’occurrence, de la constitution d’un harem au sein duquel seront désignées des favorites mais où ne seront jamais tout à fait exclues les femmes de moindre valeur, matrices potentielles à l’essence du mâle dominant.
Dans le cas des femmes, la stratégie est différente. Tout d’abord, les femmes ne visent que les hommes les plus valables et négligent les hommes qu’elles perçoivent comme de peu de valeur. Elles les ignorent la plupart du temps et si elles les considèrent, c’est afin de se rapprocher des hommes qu’elles convoitent (soit en séduisant d’abord ces hommes de peu de valeur pour profiter de leur lien avec les hommes dominants, auxquels elles réserveront leurs faveurs sexuelles, soit en les humiliant à leur tour pour montrer à ceux-là qu’elles épousent leur jugement de valeur concernant leur souffre-douleur).
Dans le cas du souffre-douleur féminin (en plus des raisons déjà données et qui ne sont pas spécifiques à un genre), le rejet et l’humiliation de celui-ci sert en grande partie à démontrer aux hommes convoités que les femmes dominantes s’évaluent elles-mêmes comme de valeur, et rejettent donc les individus qui leur paraissent être des ratés. En humiliant celle qui est anthropologiquement faible, les femmes montrent aux hommes qu’elles ont une certaine valeur et sont donc dignes d’être courtisées par les hommes qui en ont également.
Cependant, puisque les hommes dominants tendent à convoiter toutes les femmes, les femmes dominantes peuvent parfois consentir à intégrer les femmes qu’elles jugent anthropologiquement plus faibles à leur séduction et sont tout à fait capables de s’en servir comme d’offrandes sexuelles aux hommes. Il peut même arriver que des femmes s’adonnent à de telles pratiques avec leurs propres filles lorsqu’elles cherchent à s’attirer les faveurs d’un homme qu’elles convoitent. En cela, la violence est toujours bien présente mais sa forme est différente, il ne s’agit plus d’humilier la personne mais de s’en servir comme d’un moyen pour arriver à ses fins.
Les deux phénomènes exposés, celui du bouc-émissaire et celui du souffre-douleur, on peut légitimement se demander s’il n’est pas possible d’éviter de générer autant de violence et de souffrances à celles et ceux qui ne sont pourtant pas particulièrement responsables des frustrations du groupe.
C’est une vraie question et il semble que l’humanité se la pose depuis la nuit des temps.
Tout d’abord, on peut réfléchir à la façon de gérer la souffrance. Je ne vais pas m’étendre sur ce point dans cet article mais on peut considérer qu’un travail permanent de conscience, de communication saine et de remise en question sincère peut aider à ce qu’une souffrance se résolve de façon idoine, c’est-à-dire en permettant au groupe d’apprendre en redonnant à chacun ses véritables responsabilités. Cependant, cela ne peut se faire qu’à la condition par ailleurs de signes forts ayant pour but de souder le groupe. En effet, c’est bien la peur de voir leur communauté éclater qui amènent nombre de suiveurs à désigner un souffre-douleur ou un bouc-émissaire.
Ensuite, on peut chercher à symboliser les réceptacles de nos souffrances, sans pour autant qu’ils fussent des êtres sensibles à la douleur. De nombreuses traditions existent à ce sujet et l’on peut par exemple citer celle qui consiste à brûler des effigies à certains moments de l’année. Il peut s’agir d’une façon de dériver ses souffrances sur un rituel qui n’implique pas directement des êtres humains ou des animaux.
Enfin, je crois qu’il est important de partir de là où l’on en est et c’est aussi ce que je propose avec cet article, à savoir prendre conscience de ces mécanismes pour, si possible, peu à peu les sublimer en quelque chose d’autre, pour peu que le groupe en ait authentiquement la volonté bien sûr. Et cela commence par accepter le fait que ces mécanismes se mettent en place de façon bien souvent inconsciente et qu’il ne s’agit donc pas d’une responsabilité pleine et entière de la part des acteurs mais d’abord d’un phénomène naturel que nous pouvons décider d’infléchir un tant soit peu pour favoriser la mise en place de situations moins dramatiques sans pour autant perdre en qualité fonctionnelle collective. Sur ce point, le développement de notre conscience autant que la mise en place de contextes propices au changement peuvent aider.
Cependant, il ne faudrait surtout pas oublier leur raison d’être première, car les théories et les idéologies qui cherchent simplement à supprimer des comportements sans comprendre d’où ils proviennent et à quels besoins ils répondent sont intrinsèquement violentes et ne peuvent qu’engendrer de la déstabilisation, du chaos, du ressentiment et de la violence en retour. J’aurai l’occasion de revenir souvent sur ces idéologies car elles sont très nombreuses à notre époque et sont parfois promues à dessein de fragilisation de certains groupes humains.
On peut également s’interroger sur la nature nécessaire du sacrifice, soit par mise à mort du bouc-émissaire, soit sous forme de défouloir sur le souffre-douleur. Est-il possible pour un groupe d’exister sans recourir à des formes de sacrifices ? La réponse est non, car si la mise en place d’un fonctionnement social correspond à une transaction perçue comme avantageuse, elle nécessite toujours une rectification de soi-même pour le bien du groupe, c’est-à-dire, avant toute chose, un sacrifice de soi, ne serait-ce que partiel.
En effet, moins une personne est capable de consentir à des efforts pour un groupe, plus elle le fragilise et plus une personne est à même de compromettre sa nature pour le groupe, plus elle le renforce. L’idée de fonctionnements sociaux où chaque individu serait parfaitement lui-même sans contrainte est une aberration qui provient du culte individualiste moderne. Dans la réalité, un groupe humain se forme et se maintient tant que les avantages qu’il offre à ses membres dépassent les efforts qu’il demande de leur part. Les efforts en question ne sont pas nécessairement à considérer comme problématiques puisque, comme nous l’avons déjà vu, nous ne sommes pas strictement des individus, nous possédons des dimensions supra-individuelles. Mais il s’agit bien d’une transaction : je consens à faire des efforts pour le groupe tant que celui-ci m’apporte quelque chose en retour que je juge au moins aussi valable.
Notre psyché sociale implique donc nécessairement des espaces de sacrifices et plutôt que de chercher à les nier ou à les empêcher, il est préférable de réfléchir à la forme qu’ils vont prendre. Cette dernière fera d’ailleurs partie intégrante à la culture du groupe.