L’étude des illogismes et des logismes

L’étude des illogismes et des logismes
L’étude des illogismes et des logismes

Un excellent moyen de parvenir à développer une pensée saine et cohérente est d’être à même d’identifier les usages fallacieusement logiques (illogismes). Ceux-ci peuvent être utilisés par mauvaise foi (sophismes) ou par ignorance (paralogismes) et ils peuvent revêtir un très grand nombre de formes.

Ces usages erronés sont très courants dans notre société et il suffit d’allumer un quart d’heure la télévision sur une chaîne politique pour comprendre à quel point l’exercice de la vérité est absent des échanges.

Pour comprendre ce phénomène, il faut d’abord se rappeler que les structures sociales humaines présentent une tendance systématique à suivre des éléments dominants. La capacité de la plupart des gens à favoriser le vrai est donc directement liée à la capacité de ces éléments dominants à faire valoir la vérité.

Dans une société où les dominants sont eux-mêmes dans l’erreur ou bien s’ils dissimulent la vérité à dessein, la majorité est elle-même dans l’erreur et ne saurait trouver par elle-même la vérité.

Cependant, même lorsqu’il s’agit de promouvoir le vrai, la plupart des personnes ne le reconnaissent pas comme vérité mais comme acception sociale. Ainsi, si elles peuvent éventuellement favoriser la vérité dans certains contextes, ces personnes ne le font pas à dessein mais par conformisme.

Dans tous les cas de figure, les seuls profils capables de rechercher authentiquement la vérité, c’est-à-dire pour la vérité elle-même et non par imitation sociale, sont les hommes qui possèdent en eux l’essence de la vérité et qui montrent à ce sujet un caractère autonome. Il arrive souvent qu’ils soient indirectement motivés et aidés pour ce faire par des facteurs matriciels extérieurs (couple, famille, élèves, entreprise ou autre) mais la recherche de vérité authentique se produit exclusivement en eux.

Les hommes de ce type sont empiriquement assez peu nombreux, comparativement au reste des populations humaines, et la plupart possèdent des formes de spécialisation de la connaissance (le plus souvent à travers leur métier). Cette rareté implique donc une probabilité forte qu’ils se retrouvent eux-mêmes à discuter avec des personnes qui ne sont pas à même de produire un effort de vérité : toutes les femmes, qui sont dépourvues de dimension essentielle Y, et les hommes suiveurs, dominants ou autonomes mais dépourvus de l’essence de la vérité. Tout au mieux ces personnes pourront répéter des vérités qu’elles auront entendues mais ne seront pas à même de produire d’effort autonome à ce sujet.

Cependant, dans notre culture, avoir raison est socialement très valorisant. Ainsi, bien qu’ils n’en soient pas capables, la plupart des gens prétendent détenir la vérité et s’appuient le plus souvent sur des arguments fallacieux pour le faire valoir. Cette tendance est d’autant plus forte qu’un échange présente un enjeu important pour les protagonistes et le summum en la matière peut s’apercevoir dans les échanges entre deux profils dominants qui cherchent à conquérir l’assentiment d’un groupe. Dans le domaine politique, ce phénomène est légion et tous les coups sont permis pour susciter chez l’auditoire la confiance en l’un et la méfiance en l’autre, même si ces sentiments ont été nourris d’illogismes en tous genres.

La vertu des hommes capables de manifester l’essence de la vérité est de proposer au monde des visions qui sont censées réduire les évènements inattendus, dus à une méconnaissance de la réalité. On peut penser par exemple à l’ingénierie d’un barrage hydroélectrique : plus la connaissance de cette ingénierie est grande, moins il y a de risque d’une rupture imprévue du barrage.

En retour, le chemin de croix en quelque sorte de ces mêmes hommes est une grande solitude intellectuelle au sein des autres humains qui, dans les contextes où l’ignorance est grande, racontent peu ou prou n’importe quoi à longueur de temps.

Par ailleurs, l’un des sacrifices les plus nets des hommes de vérité est de s’astreindre sans cesse à une limitation des influences propres à brouiller l’exactitude de leurs déductions et inductions : leurs propres émotions et sentiments, leurs préjugés erronés et autres opinions hâtives sur le résultat des observations et mesures. Il s’agit en l’occurrence d’un processus de raffinage permanent de la pensée, un exercice particulièrement long et délicat mais aussi parfois douloureux.

Ainsi, le tri consciencieux des illogismes permet censément de révéler des logismes, c’est-à-dire des procédés de raisonnement parfaitement corrects, au moins dans la limite de ce qu’il est possible de produire (je vous renvoie à mes tous premiers articles sur les limites de l’expérience et la nature intrinsèquement réductrice de la pensée).

Il est d’ailleurs toujours plus efficace de considérer la qualité des méthodes plutôt que leurs usages occurentiels. En effet, il est inutile de rectifier les erreurs des démonstrations contextuelles : cela prend non seulement beaucoup de temps mais demeure aussi interminable tant que les méthodes employées restent erronées, puisque celles-ci ne cessent de produire des analyses manquées.

Il est toujours plus pertinent de dire à une personne “Voilà comment tu t’es trompé.” plutôt que “Tes résultats sont faux.”

Du mieux que je peux, à tout instant, cette application rigoureuse à l’exactitude est ce qui me meut dans mon travail et l’expérience montre qu’il n’est jamais inutile de revenir parfois sur ses conclusions passées pour les réétudier à la lumière d’une qualité d’analyse qui, espérons-le, est supérieure à celle qui les a produites.